Centre Maurice Halbwachs

Inégalité subjective au Chili

Représentation des différences sociales (in)justes à travers le temps

Cette thèse porte sur l’inégalité subjective au Chili au fil du temps. Avec le retour de la démocratie (1990), le pays a connu une croissance économique soutenue qui lui a permis de réduire les niveaux de pauvreté et d’augmenter les taux d’éducation. Parallèlement, avec le développement d’une série de politiques sociales, à partir de l’année 2000, la concentration économique du pays, historiquement classée parmi les plus élevées du monde, a commencé à diminuer. Cependant, alors que les niveaux de bien-être augmentaient et que les inégalités diminuaient, une série de manifestations sociales commençaient à avoir lieu, parmi lesquelles celles dirigées par le mouvement des étudiants en 2006 et 2011, considérées comme les plus importantes que le pays ait connues depuis la fin de la dictature. Le diagnostic de toutes ces manifestations faisait ressortir le problème des inégalités sociales comme un frein au développement du pays. Le grand soutien qu’elles ont suscité auprès des citoyens a eu un impact certain sur la configuration des agendas politiques de tous les secteurs et a amené le débat public à se concentrer sur la question de savoir si les principes de justice dans lesquels la société chilienne avait construit son pacte social après la dictature avaient changé. Est-ce que les transformations des conditions de bien-être étaient liées à une critique de la logique de marché, laquelle avait légitimé de fortes inégalités depuis la période de réformes néolibérales promues dans les années 1980 ?

La thèse s’adresse à cette question du point de vue des individus, en se demandant dans quelle mesure leurs représentations de l’inégalité et de ses facteurs sont stables ou fluides à travers le temps. À partir de l’analyse d’un ensemble de données quantitatives (enquêtes ISSP 1999, ISSP 2009, SJCP 2013 et COES 2014) et de données qualitatives (40 entretiens semi-dirigés), il est établi que les représentations de l’inégalité peuvent être appréhendées à travers trois dimensions, les perceptions, les croyances et les préférences, lesquelles sont influencées par des facteurs qui agissent à deux niveaux : la position sociale et l’expérience personnelle des individus.

Les résultats de l’étude montrent que les représentations ont évolué dans le temps, mais avec une intensité différente selon la dimension analysée. Et si l’on considère les facteurs, les résultats montrent, tout d’abord, que la position sociale des individus, en particulier le niveau d’éducation, est un puissant prédicteur des représentations de l’inégalité. Suite aux transformations de la structure sociale au Chili, les individus de statut social inférieur perçoivent des changements plus significatifs dans leurs représentations de l’inégalité. Ensuite, au niveau de l’expérience personnelle des individus, on observe que les changements du contexte sociopolitique influencent fortement leurs représentations de l’inégalité, ainsi que leur évaluation des transformations structurelles de leur cadre de vie. Quel que soit leur statut social, les évaluations de l’inégalité par les individus sont plus fortement marquées par leur perception comparative des différents moments de leur propre histoire que par une comparaison avec d’autres personnes ou groupes sociaux.

Direction

  • Caroline Guibet Lafaye

Co-direction

Juan Carlos Castillo

Composition du jury

Emmanuelle Barozet, Professeure des universités, Université du Chili, rapporteure.
Gilles Bataillon, Directeur d’études EHESS, examinateur.
Juan Carlos Castillo, Professeure des universités, Université Catholique du Chili, co-directeur de thèse.
Olivier Galland, Directeur de recherche CNRS, examinateur.
Caroline Guibet Lafaye, Directrice de recherche CNRS, Directrice de thèse.
Sylvie Mesure, Directrice de recherche CNRS, rapporteure.

Soutenance

18/03/2019

CMH, 48 bd Jourdan, Paris 14ème, bâtiment Oïkos, salle R2-02, 2ème étage.
Posted on 19/05/2021 par Rodrigo Yanez (last update on 22/06/2021)